Formations en orientation et gestion de la carrière
Beaucoup de pays possèdent des politiques d’orientation et des professionnels qui s’occupent de l’accompagnement. En général ceux-ci se répartissent en deux catégories distinctes , les intervenants dans l’enseignement et les conseillers professionnels. Ainsi les “guidance counselors” possèdent souvent une spécialisation “school”,”high school” ou “professional”. Une des spécificité de la France est de réglementer les seuls professionnels intervenants pour les jeunes dans l’enseignement primaire ou secondaire (psychologues de l’éducation). C’est comme si l’école était supposée offrir une voie toute tracée à chacun.
Toutefois, pour les adultes salariés ou en recherche d’emploi, il existe aussi, en grand nombre, des conseillers en formation qui exercent à l’AFPA, Pôle emploi, l’Apec… Formations, types de recrutement et conditions d’emploi sont alors souvent diversifiés. Pourtant, ces personnels possèdent un enjeu commun et développent au fil du temps une culture relativement proche, que ce soit en France ou à l’ étrangers. L’Association internationale d’orientation scolaire et professionnelle (AIOSP) en est l’illustration. Déjà, en 1998, l’ONU avait publié un guide de l’orientation professionnelle. En 2001, un rapport officiel piloté par John McCarthy a fait le point sur les services d’orientation dans le monde. Nous traiterons ici plus spécifiquement des conditions de formation et vous renvoyons à la rubrique Pro de l’orientation pour d’autres éléments.
L’orientation : une organisation du champ politique – Réponse à Bernard Desclaux
Bernard Desclaux a publié une réflexion ”
Psychologie, orientation, éducation 2 : début de réflexion
“Je commencerai par développer quelques remarques sur les origines de mon interrogation sur l’histoire de l’orientation en France. Cet intérêt m’a accompagné tout au long de ma carrière, mais c’est assez tard qu’un cadre organisateur s’est imposé.”
Voici une contribution à ce débat :
C’est une analyse intéressante et stimulante. Toutefois, pour la petite histoire, je crois me rappeler que l’Inetop avait réalisé très tôt une étude (à mon avis scientifiquement discutable) dont le résultat a été martelé année après année, démontrant l’inefficacité de l’ADVP. C’était déjà l’avis de la mission envoyée au Québec dans les années 1970, mission à laquelle participait Raphaël Bégarra. Très tôt, ces freins volontaires à toute évolution du concept même d’orientation la placent cette organisation administrative dans le champ politique. Celui-ci souhaitait à l’époque une orientation conçue comme une « bonne » répartition des jeunes ( The right man at the right place) sous contrôle de l’Etat (répartition en fonction des besoins de l’économie), les COP devenant les agents de cette gestion.
A cette période on adjoint donc une dimension économique à la notion d’accompagnement social fondé sur le talent et le mérite. Elle se justifiait dans un contexte économique confronté à un tissu industriel en plein changement, mais aussi au fort malaise exprimé dans les évènements de 1968. Ce sont ces évènements qui ont conduit à une forme de compromis donnant à l’école la mission d’orienter tout en maintenant en son sein des agents fonctionnaires régulateurs disposant d’une certaine autonomie.
Or cette politique et tout son système de gestion n’a pas bougé depuis 1971. En 2003, devant les dysfonctionnements déjà constatés dans l’insertion professionnelle, l’hypothèse de la montée rapide du média numérique et des transformations accélérées des environnements de travail et par conséquence de la formation tout au long de la vie, l’association “apprendre et s’orienter” avait proposé de transférer en France le concept de l”Approche orientante”. Limiter l’orientation au seul domaine scolaire basé sur les notations disciplinaires paraissait alors en décalage face aux nouveaux défis et risquait de produire une société figée par un système d’orientation daté reposant entre autres facteurs sur un verrouillage a priori des aspirations individuelles.
Ceci aurait nécessité d’établir un nouveau contrat entre l’institution scolaire, les jeunes et leurs familles. Il aurait fallu reconnaitre ce que tout le monde sait aujourd’hui : que l’on construit son parcours de vie en même temps que ses apprentissages et que le rôle de l’école pourrait inclure celui d’initier et d’accompagner un premier parcours mais aussi de préparer la suite en développant des compétences d’autonomie en la matière, à savoir gérer l’information, projeter et choisir. Peut-être aurait-il fallu églement remettre en cause le système sélectif des « élites » parfois contre productif.
Apprendre et s’orienter proposait d’introduire dans chaque projet institutionnel, pédagogique ou personnel une dimension “orientante”, démarche visant également à renforcer un sentiment d’efficacité personnelle. Ceci a fait l’objet de timides avancées en termes d’information, l’Onisep éditant quelques fascicules montrant le lien entre les disciplines et l’avenir économique ( Dossiers Perspectives de l’Onisep). Le premier Webclasseur (espace numérique personnel) était également fondé sur cette idée que les parcours pouvaient se construire individuellement en donnant de la signification aux informations et aux apprentissages (Webclasseur Onisep). Admission post Bac avait été enfin élaboré en ce sens avant d’être en partie détourné de sa fonction première pour commencer à devenir un début d’instrument de sélection.
Les Conseillers auraient pu jouer un important rôle d’accompagnement mais le problème ne semble plus se poser aujourd’hui qu’ils n’existent plus. Seul subsiste le système créé en 1971. Comment gérer politiquement cette situation maintenant ?
Jean-Marie Quiesse – janvier 2008
Je renvoie aux articles sur www.apprendreetsorienter.org
QUIESSE JM – 80 ans d’orientation française – Du quantitatif au qualitatif
QUIESSE JM- L’orientation en France, un processus administré autour de 9 droits
QUIESSE JM- Développer le sentiment d’efficacité personnelle par une approche orientante (CNAM 2010)
FERRE D. L’approche orientante, clé de voute des apprentissages – Cahiers pédagogiques
Et les ouvrages de Danielle Ferré, jean-Marie Quiesse et Alain Rufino dont– L’approche orientante, une nécessité
L’approche orientante, clé de voûte des apprentissages
Cahiers Pédagogiques – Dossier L’orientation – n°463 – Mai 2008
Danielle FERRE
« Ce qui est important, c’est d’avoir un projet de vie » – Jean-Marie Lehn, Prix Nobel de chimie 1987
A sept ans, à quinze comme à dix-huit et plus tard aussi, on a des rêves y compris de métier. Certains rêves n’ont aucune vocation à devenir des projets. On les caresse, sans jamais se demander comment les réaliser. D’autres font « écran » entre soi et le réel. D’autres enfin peuvent devenir le point de départ des intentions : je m’imagine chanteuse, je me vois chirurgien … L’intention devient un projet lorsque les conditions de réalisation sont examinées et les obstacles levés : quelle formation ? Quelles perspectives d’emploi, de carrière ? Dans quel environnement géographique vais-je travailler ? Ce métier correspond-il à mes valeurs ? Me laissera-t-il du temps et de la disponibilité pour d’autres activités sociales, sportives, pour avoir une vie de famille ? Comment vais-je financer mes études ?
Si tous les obstacles ne peuvent être levés, alors la personne redevient disponible pour examiner une autre intention ou pour rêver à nouveau. Selon cette définition, il n’y a donc de projet que réalisable.
- Le professeur peut-il orienter ?
Le professeur qui « entre en orientation » se demande parfois avec angoisse : que vais-je leur dire des métiers ? Quel pronostic vais-je faire sur leur avenir ? Et de manière un peu automatique il lance la question-bouée : que veux-tu faire plus tard ? Mais à l’usage aucune de ces trois questions n’est opérationnelle. En effet si ce n’est guère le métier de l’enseignant de « parler métiers », c’est encore bien moins le sien de prédire la vie des élèves.
Par définition imprévisible[1] l’avenir l’est encore plus dans un contexte maintes fois analysé de bouleversements économiques et sociaux. Chacun a certes le droit d’imaginer « ce qui va arriver » en général ou aux autres, mais non de confondre ses hypothèses avec une quelconque réalité, tout particulièrement lorsqu’il exerce un pouvoir. Qui ne connaît au moins une personne qui, ayant gagné en appel son passage dans la classe supérieure, a parfaitement réussi, et l’année suivante et dans sa profession ? Et pourtant le conseil de classe avait décidé de stopper sa progression. En fait on ne sait rien de l’avenir. C’est tout. L’observation par ailleurs montre que, jusqu’en terminale, et parfois à l’université, la plupart des jeunes n’ont pas de projet professionnel au sens défini ci-dessus. Ils ont des rêves, souvent plusieurs, et aussi parfois des intentions. Sommés en classe de décliner des projets qu’on ne leur a pas permis de faire, ils expriment au mieux des stéréotypes, au pire des rêves- écrans qui s’en trouvent alors renforcés.
Alors faut-il comme avant 1989[2], laisser jouer le mécanisme brut de la reproduction sociale ?
Non évidemment, car même pour des bons élèves, le message « Tu verras après le bac » peut se révéler assassin. Avoir de bonnes notes et ne pas être en projet fait courir le risque, porté par une trajectoire familiale et scolaire convergentes, de se retrouver ingénieur ou médecin sans l’avoir choisi, et d’avoir l’impression de ne pas se réaliser.
La question à poser peut être formulée ainsi : comment au cours des années collège, des années lycée, voire dès le primaire, agir pour amen er l’élève à construire une compétence à s’orienter qui lui sera utile dans la sphère professionnelle comme dans la sphère personnelle, tout au long de sa vie ?
- L’approche orientante, un changement de paradigme
A partir de 1996, l’éducation à l’orientation représente une tentative du système éducatif d’aller en ce sens. Mais, fondée sur une conception linéaire de l’orientation et de la vie : adéquation individus/ environnements professionnels , croyance en la possibilité d’un « bon choix » ou de « bons choix successifs », déconnectée des apprentissages et surtout en l’absence de véritables projets d’établissements, elle ne prend pas. En 2003, l’association apprendre et s’orienter introduit en France le concept québecois[3] d’approche orientante qui constitue de son point de vue un changement de paradigme[4]
Avec l’approche orientante[5], il s’agit en effet pour les éducateurs (chefs d’établissements, professeurs, conseillers principaux d’éducation, conseillers d’orientation-psychologues) en relation avec les parents et les partenaires socio-économiques d’organiser l’école : école primaire, collège, lycée, lycée professionnel, université, de telle façon qu’elle devienne dynamique et porteuse pour chaque élève et qu’elle l’amène à construire ses connaissances et ses compétences, non pour « plus tard » mais « ici et maintenant ».
C’est à l’école que revient la responsabilité d’être en projet suffisamment, pour offrir à l’élève les occasions de construire son « orientabilité » c’est-à-dire : sa compétence à prendre conscience de soi au fur et à mesure de son développement ; à connaître et interagir avec ses environnements à travers des expériences ; à se saisir des opportunités, à réussir son parcours en se percevant efficace et à s’insérer dans la société au moment et à l’endroit de son choix.
A la fois simple et complexe l’approche orientante amène chacun des acteurs du système éducatif, et aussi les partenaires, à adopter une posture pro-active : à se demander comment construire des environnements, facilitant dans toutes ses dimensions le développement des enfants et des adolescents.
- Mobiliser, infuser, coopérer
Dès le primaire on peut réunir les conditions pour mettre en mouvement les élèves et les rendre actifs au quotidien, autour de projets d’apprendre et de projets de vivre ensemble[6].
D’autre part toute situation exceptionnelle : voyage, mini-entreprise, action humanitaire, radio scolaire, exposition, montage d’un spectacle…qui offre aux élèves l’occasion d’exercer leur pouvoir d’agir, de décider, de prendre des responsabilités, de coopérer entre eux et avec les adultes, participe de l’approche orientante car elle les mobilise.
Au collège et au lycée, de la même façon et indépendamment de ces situations exceptionnelles, le cadre de n’importe quel cours permet à l’enseignant en « infusant » sa discipline, de saisir à son gré les opportunités qu’offre le programme[7], pour faire des liens avec des métiers, des activités professionnelles. «Faire des liens », « jeter des ponts » ne veut pas dire « parler de », ni surtout « enseigner » les métiers mais plutôt éveiller la curiosité des élèves, les inviter à « faire des recherches sur » et chaque fois que possible à faire des expériences. Ces recherches s’effectuent en dehors du cours, au CDI, sur Internet, auprès de professionnels, en immersion en entreprise (stages)[8]. Ce sont des situations d’apprentissage authentiques qui donnent matière à des restitutions en classe sous forme de poster, article de presse, message vidéo, etc…où les élèves exercent leur créativité tout en acquérant des techniques d’expression. Elles contribuent à la construction de la compétence « autonomie et initiative des élèves» décrite dans le Socle commun de connaissances et de compétences[9].
Bien managé, le groupe-classe devient-il ainsi ressource pour chacun de ses membres. L’effet de l’infusion se trouve démultiplié si, porteurs de valeurs partagées, plusieurs enseignants, en relation avec les autres membres de l’équipe éducative, les parents et les partenaires de l’école, coopèrent, c’est-à-dire agissent dans un sens défini en commun, car alors le processus d’apprentissage et d’orientation prend sens pour l’élève. L’école fonctionne pour lui comme cadre d’analyse de sa situation d’apprenant, de citoyen, de consommateur et de futur producteur.
- S’informer
La question récurrente de l’information pour l’orientation est également envisagée autrement. On sait maintenant que l’information est une permanente co-construction entre celui qui émet le message et celui qui le reçoit mais, qu’au final, c’est le destinataire qui donne le sens, parce qu’il en modifie le contenu au fur et à mesure de l’utilisation qu’il en fait[10]. Il n’est donc pas question d’informer les élèves, mais de les mettre le plus souvent possible en situation de s’informer, c’est-à-dire d’accéder aux sources d’information, de recueillir des données, de les confronter, de réfléchir à leur fiabilité et enfin de les rapporter à eux-mêmes, pour confronter leurs rêves et nourrir leurs intentions. Ces situations peuvent être individuelles ou collectives[11] mais un outil s’avère nécessaire du CP à l’université, pour que l’élève s’approprie son parcours, sur le plan symbolique comme sur le plan pratique. Cet outil strictement personnelest le porte-folio, ou dans sa version numérique le webfolio. Il est particulièrement précieux dans le cadre d’un entretien de conseil préparant une prise de décision.
- Comment rendre les activités scolaires orientantes ?
Pour agir on peut s’inspirer de multiples expériences réussies au Québec et en France[12] mais l’esprit même de l’approche orientante implique que soit sollicitée l’imagination et la capacité à s’organiser des acteurs et des équipes. Les possibilités d’actions sont certes infinies mais elles sont aussi contextualisées. En fait pour les collègues familiers des pédagogies actives, il s’agit seulement de faire un pas de côté. Ce « pas de côté », qui cependant ne va pas de soi, consiste à considérer que la construction de son parcours de vie (professionnel, relationnel, citoyen) par chaque élève est ce qui donne le sens à la construction de ses apprentissages et non l’inverse. Il découle de ce changement de point de vue que la compétence à s’orienter tout au long de la vie : s’informer, s’évaluer, hiérarchiser des choix, décider, réaliser, est pour chacun la compétence déterminante à construire à l’école.
Seuls des adultes animés d’un réel sentiment d’efficacité personnelle et conscients de posséder des marges de manœuvre personnelles et professionnelles, peuvent conduire un tel processus. D’où une indispensable évolution de notre système éducatif, vers une plus grande autonomie des établissements, assortie d’une évaluation des organisations mises en place localement pour atteindre les finalités, et aussi – il faudra aller bien jusque là – d’un pouvoir d’action et de décision rendu aux élèves et à leurs familles.
Danielle Ferré – 2008
Conseillère d’orientation-psychologue, Montpellier Présidente de l’association apprendre et s’orienter
[1] Le grand humoriste Pierre Dac ne disait-il pas : « L’art de la prospection est difficile, surtout lorsqu’elle concerne l’avenir »
[2] Loi d’orientation sur l’éducation du 10 juillet 1989
[3] Pelletier D. L’approche orientante : La clé de la réussite scolaire et professionnelle, Septembre édi teur, 2004.
[4] Ferré D. Pour une approche orientante de l’école française, Qui plus est, 2005.
[5] Quiesse J.-M., Ferré D., Rufino A.,L’approche orientante, une nécessité. Tome 1 L’approche orientante, pourquoi ? (Préface : Etienne R., Postface Danvers F). Tome 2 L’approche orientante, comment ? (Préface Brunel O.) Qui plus est – 2007.
[6] Ecole Balard, Montpellier http://www.cafepedagogique.net/lesdossiers/Pages/rurale06_7.aspx et Ecole Cœurs Vaillants à Québec http://pedagogie.csdecou.qc.ca/des-coeurs-vaillants/
[7] Une expérience au lycée Joliot Curie de Sète (2004 a montré que chaque discipline est en lien avec une vingtaine de métiers environ
[8] Orientation-Lycée 1ére S.14-15-16 (2000) Ferré D. (ed) Gustau G., Pénisson-Kleinhans R.-E., Roquigny P., L’Harmattan.
[9] Décret du 11-7-2006
[10] A.Rufino
[11] Lycéens prenez votre orientation en main (2006) Ferré D., Quiesse J.-M.,L’Harmattan et L’orientationc’est l’affaire de tous T.2 (2007) Ch. Comment apprendre à construire une information orientante SCEREN Crdp Académie d’Amiens.
[12] Ouvrages et articles cités – Site de l’ AQISEP http://www.aqisep.qc.ca/- Dossiers Perspectives de l’Onisep Français et découverte des métiers, Histoire-Géographie et découverte des métiers, Sciences de la terre et découverte des métiers.
S’orienter dans un monde en mouvement (de hasards)
Peut-on apprendre et s’orienter dans toutes les configurations de l’existence ? Quelle est la place du conseil en orientation ? Va-t-on, comme au Québec, vers des sciences de l’orientation? Quelle serait la voie française en ce domaine ? L’orientation, au sens fort du terme, est un processus dynamique qui concerne tous les âges de la vie et englobe toutes les sphères de l’existence. Jamais le sens des possibles n’a été en apparence aussi ouvert et le domaine des interactions sociales aussi multiple, en ce siècle de mobilité et d’apprentissage tout au long de la vie. Pourtant, le sentiment de désorientation domine, des inégalités d’accès persistent et les systèmes d’information de plus en plus performants à l’ère numérique ne sont pas nécessairement à la hauteur des attentes des publics auxquels ils s’adressent.Pour la première fois, un colloque de Cerisy a réuni des chercheurs, des praticiens et de « grands témoins » autour d’une question vive : S’orienter dans la vie en croisant les regards dans une perspective transdisciplinaire et holistique. Placée sous le signe de la francophonie internationale avec un pays invité, Haïti, cette rencontre avait tout son sens en 2015, « Année internationale de la lumière (Orient) et des techniques s’y rapportant » sous l’égide de l’Unesco, dont l’un des grands défis contemporains est l’éducation.Les actes du colloque “s’orienter dans un monde de hasards” a été publié sous le titre “S’orienter dans un monde en mouvement” Recension de l’ouvrage : Aziz Jellab, « Francis Danvers, S’orienter dans un monde en mouvement », L’orientation scolaire et professionnelle, 47/3 | 2018, 557-561. |
Yvette Mottin
Yvette Mottin, directrice du Centre d’information et d’orientation de Pointe à Pitre de 1960 à 1991 nous a quittés le 4 novembre 2017. Elle n’était pas une habituée des réseaux sociaux mais elle n’en avait pas besoin. Son empathie et son sens de l’amitié ont rayonné durant des décennies. En Guadeloupe, véritable vedette de la radio, elle animait une émission de conseil en éducation destinée aux familles. Mais beaucoup d’autres de ses contributions ont fait la renommée du CIO où elle faisait preuve d’une amicale autorité . Cet établissement public est alors devenu un des plus importants de France jusqu’à la création de celui de Basse Terre puis des autres.
Yvette, beaucoup te doivent d’avoir donné un sens très fort à leur profession et nous sommes fiers de l’amitié fidèle qui nous a rassemblé autour de toi jusqu’à ce mois de novembre 2017.
Jean-Marie Quiesse
Voici l’hommage rendu à Yvette Mottin par sa collègue et amie Monique Hatchi :
“Au nom de tous les collègues qui se sont succédés au Centre d’Information et d’Orientation de Pointe à Pitre de 1960 à 1991, je voulais te dire un grand MERCI !!!!
Tu as été pour nous une merveilleuse directrice, sachant nous accueillir dans nos diversités, avec nos richesses et nos limites, nos caractères souvent bien trempés et pas toujours faciles à canaliser !
Avec intelligence et délicatesse tu as su faire ressortir le meilleur de chacun de nous dans le but premier d’offrir aux usagers un service public de qualité. Tu t’es battue avec force et détermination pour des causes justes, toujours dans le souci du bien des autres. Tu as su innover dans tes pratiques pour t’adapter aux besoins spécifiques de la population guadeloupéenne qui a toujours été chère à ton cœur.
Tu nous as également permis de découvrir les particularités de la Guadeloupe sous ses multiples facettes : linguistiques, culturelles, historiques et bien sûr nous faire entrer dans la richesse des rapports humains que tu as tissés au fil des ans avec la générosité qui t’appartenait.
Certes tu as été un magnifique modèle professionnel, mais plus que tout, nous admirions la femme d’exception, pétrie d’humanité, de compassion, de bienveillance, toujours à l’écoute de chacun dans un souci de comprendre les situations en profondeur pour faire émerger des solutions positives. Nous sommes nombreux à avoir pu bénéficier de ton aide très concrète durant des périodes difficiles de nos vies et ce que tu as fait pour nous reste à jamais gravé dans nos cœurs.
Au fil des années tu es devenue pour moi une amie très chère, une véritable sœur. Nous pouvions débattre en profondeur et joyeusement de tous les sujets sans tabou et dans un grand respect mutuel.
Je sais aussi combien tu étais attachée à toute ta famille (de sang et de cœur) et combien tu les as chéris comme tes propres enfants et petits enfants.
Je suis certaine que Jésus, dont nous avons si souvent parlé ensemble, t’a ouvert tout grand les bras pour t’accueillir dans la Lumière et la joie de son Royaume !
Pour tout cela Yvette, nous te disons MERCI : nous t’aimons très fort !
Approche orientante et apprenance : nouveau paradigme de l’orientation scolaire et professionnelle
Danielle FERRE – Jean-Marie QUIESSE
Résumé
Pour se construire dans une époque où le changement est la réalité vécue, le sujet doit pouvoir bénéficier en permanence d’accompagnements et de conditions d’apprentissage accordés à son besoin d’orientation et d’emploi. Lorsque ce qui importe c’est de savoir devenir, alors apprendre et s’orienter tout au long de la vie sont posés comme des valeurs de cohésion sociale et de réalisation personnelle. Apprenance et approche orientante sont les moteurs de cette nouvelle donne. Ces concepts ont en commun l’utilisation de méthodes actives, coopératives et mobilisatrices qui créent des cadres d’analyse pour des expériences authentiques autour de projets orientants, chacune et chacun étant mis en situation de développer son sentiment d’efficacité personnelle, fondement de l’agentivité humaine (human agency[1]) et de développer les compétences esssentielles à la mobilisation des ressources utiles dans un cadre décisionnel. Ces notions obligent à reconsidérer les notions consécutives de formation initiale et continue.
Mots clefs
Projet orientant – apprenance – approche orientante -sentiment d’efficacité personnelle – agentivité humaine – se construire – savoir devenir – accompagnement.
Abstract.
To build oneself in a time where change becomes a day to day’s reality, the educated person must be able to profit permanently from accompaniments and conditions of training that correspond to his need for orientation and employment. When knowing how to develop oneself, how to learn and to be directed throughout the life are considered as values for social cohesion and personal realization, self-learning and orientation approaches become a central motive.
These approaches have in common the use of active methods, the use of cooperative and mobilizing actions which create a framework for authentic experiences around orienting projects that help the person to develop one’s sense of personal effectiveness which constitutes the foundation of human action. For this, we need to reconsider the concepts of initial and continuous professional education and training.
Keywords
Orienting projects; self-learning ; orientation approach ; personal self-efficacy beliefs ;human agency – self-building ; becoming ; accompaniments.
Introduction
Le diplôme, même s’il est régulièrement critiqué, les acquis de l’expérience et l’accès à des réseaux (familiaux, économiques, sociaux…) fournissent de nos jours les critères principaux de la hiérarchisation professionnelle mais aussi sociale. Dans ce contexte chacun est sollicité pour construire son parcours de vie en même temps qu’il construit ses apprentissages. La formation nourrit l’orientation. Mais c’est l’accès à la « formation utile » en fonction de ses intentions d’orientation qui permet à chaque personne de se réaliser de façon pertinente dans un univers de « travail flottant » (Sennet, 2006). C’est alors au « milieu » (école, entreprise) qu’il appartient dans le moment présent de créer les repères structurants nécessaires, faciliter l’accès aux ressources pertinentes, développer les compétences informationnelles et décisionnelles. Etroitement liés par l’histoire moderne, apprendre et s’orienter semblent émerger comme des axes forts de la société, comme des valeurs permettant la réalisation personnelle mais aussi comme des moyens d’assurer une cohérence sociale.
La démarche orientante consiste pour le « milieu » à s’organiser pour offrir aux personnes des situations formatrices permettant d’entreprendre et de mener à terme des projets orientés vers la connaissance de soi et l’inclusion dans la société. Fondée sur l’autonomie de l’apprenant, cette démarche utilise la souplesse des réseaux numériques, fait exploiter activement les bases de données, met en œuvre les réseaux sémantiques et les cartes conceptuelles, donne à vivre des expériences réelles et des échanges à travers lesquelles la personne construit son sentiment d’efficacité personnelle et développe les compétences utiles à la mobilisation des ressources décisionnelles. Dans une approche orientante, l’apprenant est actif, entrepreneur de la construction de connaissances vivantes. La formation s’élabore en fonction du besoin et enrichit un projet personnel de développement.
Dans une première partie, nous décrirons des éléments de contexte. Puis nous définirons les concepts d’apprenance et d’approche orientante (2). Nous montrerons ensuite que ces concepts ont des bases communes (3). La quatrième partie indiquera des modalités d’action en formation initiale où il a été montré que les principes de l’approche orientante produisaient les effets attendus.
1/ Un nouveau paradigme de société
« Notre société d’aujourd’hui ressemble davantage aux paysages en mouvement qu’à un château de pierre » et il s’agit bien d’un nouveau paradigme, une conception explicative largement partagée (Touraine, 2005). Dans cette société fragmentée navigue l’ homme numérique. Vers quel port ? Sujet auto-créateur, placé au centre de réseaux de communication il apparaît que c’est en effet désormais davantage l’individu, quelque soit son origine et son niveau, centre d’appropriation de l’information mais aussi centre de décision (Quiesse-Ferré-Rufino, 2008), qui projette son devenir et non plus la seule société.
Le soin d’influencer ou de piloter les destins collectifs est aujourd’hui le fait des « manipulateurs de symboles » (Rifkins, 2005) dont une des caractéristiques repose dans leur très haut niveau de technicité, mais aussi de formation faisant appel à de nombreuses formes de l’intelligence (Gardner, 1996)[2]. Le diplôme, même s’il est régulièrement critiqué, les acquis de l’expérience et l’accès à des réseaux socio-constructivistes deviennent les critères principaux de la hiérarchisation professionnelle mais aussi sociale, « la socioconstruction du monde nous éloigne radicalement des systèmes retardataires centrés sur la technologie… pour nous associer aux pédagogies actives et transdisciplinaires » (Harvey, Lemire, 2001, 103). Les innovations auxquelles participent ces personnes modifient les techniques, les habitudes, les organisations et les représentations construites dans la période post-moderne. La décomposition des structures et repères sociaux s’accompagne de déperditions du sens. Le sujet s’y affirme en luttant contre ce qui l’aliène et l’empêche d’agir en fonction de la construction de lui-même (Touraine 2005). Et pour se construire il doit pouvoir accéder à une formation en accord avec son besoin d’orientation mais aussi qui le prolonge : « cette apprenance est devenue essentielle dans une société ouverte qui réélabore en permanence ses savoirs, réorganise ses champs de connaissance » (Boutinet, 2006).
A. Le contexte européen
Avec la « stratégie de Lisbonne » (2000), le savoir devient force motrice du développement personnel et professionnel. Le 21 novembre 2008 le Conseil européen adopte une résolution. Celle-ci affirme « la définition de l’orientation en tant qu’un processus continu qui permet aux citoyens, à tout âge et tout au long de leur vie, de déterminer leurs capacités, leurs compétences et leurs intérêts, de prendre des décisions en matière d’éducation, de formation et d’emploi et de gérer leurs parcours de vie personnelle dans l’éducation et la formation, au travail et dans d’autres cadres où il est possible d’acquérir et d’utiliser ces capacités et compétences. »[3]
B. Les nouvelles donnes de l’orientation
Chaque époque a son modèle et chaque personne est à son époque. Nous sommes sur des changements où chacun veut se réaliser avec ses identités possibles, « La réalité n’est pas seulement changeante, mais le changement est notre réalité. » (Pelletier, 2006). Le changement n’est plus un processus délibérément choisi mais un état permanent, une valeur en soi (Sennet, 2006). Ceci modèle de nouveaux comportements humains et des attentes. Etroitement liés par l’histoire moderne, apprendre et s’orienter semblent émerger comme des axes forts de la société, posés comme des valeurs mais aussi conçus, mariés à l’expérience, comme des moyens[4] d’assurer une cohérence sociale mais aussi la réalisation personnelle. Mais cette reconfiguration ne peut se faire au détriment du « vivre ensemble » qui lui-même ne peut reposer sur un système d’élimination.
Au regard des nouvelles exigences de la modernité il convenait auparavant de se soucier du devenir de l’enfant. Aujourd’hui, il s’agit bien d’une prise en charge de la vie adulte à travers différents dispositifs de formation et d’accompagnement. La préoccupation d’orientation ne se confine plus à la jeunesse mais à tous les âges de la vie. « La nécessité de disposer en permanence d’une pluralité de repères à questionner et à relativiser, quels que soient les âges de la vie, définit en conséquence ce que l’on peut appeler ici l’approche orientante » (Boutinet, 2006). Il convient de créer dès l’école des repères structurants au prix d’un investissement dans le moment présent. Plus de la moitié des jeunes de trente ans travaillent dans un secteur très éloigné de celui qu’ils avaient préparé dans leurs études[5]. L’étudiant de 1970 se posait la question du métier, celui des années 2000, pense « employabilité » (Carré, 2005), et bientôt il pensera « orientabilité » (Quiesse-Ferré-Rufino). Enfin, il ne faut pas compter s’appuyer sur des compétences préalables lorsqu’il s’agit d’orientation adulte à moins que les salariés n’aient acquis par expérience et formation préalable les moyens de les transférer. Dans un tel contexte on construit son parcours de vie en même temps que l’on construit ses apprentissages.
L’orientation rejoint la formation et l’éducation, pensées comme des apprentissages « tout au long de la vie ». Il convient donc de conjuguer approche orientante et apprenance à travers le développement de la capacité continuellement offerte à rebondir par une recomposition dynamique des trajets de vie. « Le savoir devenir devient l’impératif premier, ce savoir devenir qui cherche à intégrer les composantes dégagées par une expérience interminable d’orientation, permettant sans cesse de mettre en face à face le hasard de la conjoncture avec ses contraintes et ses opportunités, les évènements, les aléas des décisions prises, les expériences passées à recapitaliser, enfin les autres dans la diversité de leurs visages aussi bien ressources que confrontants» (Boutinet, 2006).
Face à ces enjeux sociaux, économiques et pédagogiques, les cadres de pensée sur la formation comme ceux sur l’orientation, hérités du modèle industriel et construits sur le scénario de la transmission, ne tiennent plus. Les priorités s’inversent : l’orienteur cède le pas à la personne qui s’oriente, l’enseignement cède le pas à l’apprentissage, le formateur à l’apprenant. Deux nouvelles attitudes apparaissent : l’apprenance[6] et l’approche orientante. C’est la notion de mobilisation de ressources à travers le projet personnel qui les relie.
2/ APPRENANCE ET APPROCHE ORIENTANTE
A. Qu’est-ce que l’apprenance ?
Selon Philippe Carré (2006) « l’apprenance décrit un ensemble stable de dispositions affectives, cognitives et conatives[7] favorables à l’acte d’apprendre, dans toutes les situations formelles ou informelles, de façon expérientielle ou didactique, autodirigée ou non, intentionnelle ou fortuite », « …sur le plan affectif, elle indique que l’idée d’apprendre sera a priori vécue sur un mode positif, en tant que source possible de plaisir, d’émotions, d’affects, de sentiments agréables », « …sur le plan cognitif, l’apprenance suppose que les représentations de l’acte d’apprendre émises par le sujet seront propices au déploiement de modes efficaces de traitement de l’information (attention, concentration, stratégies cognitives, métacognition…) », « … sur le plan conatif, l’idée d’apprenance véhicule celle d’un rapport intentionnel, proactif, au fait d’apprendre… Le terme… traduit le choix et orientations des conduites. C’est le registre par excellence du projet ((Boutinet), de la motivation, l’engagement dans l’action» .En 2000, il disait déjà : « …A travers la formule du sujet apprenant se croisent à la fois les apports du raz-de-marée cognitiviste en psychologie, les héritages bien vivaces de l’éducation nouvelle et des pédagogies de l’activité, les influences contradictoires de l’inspiration autogestionnaire et de la pensée libérale».
Ces affirmations peuvent-elles s’appliquer aussi à la formation initiale ?
Précurseur, J.Dewey, aux Etats-Unis dès 1897, prône l’expérience comme manière d’apprendre. Pour Vygotski, L. (1934) et Bruner J. (1997) : l’enfant participe à la construction de son intelligence en interaction avec l’environnement. La construction d’un savoir, bien que personnelle, s’effectue dans un cadre social. L’acte d’apprendre est une interprétation d’une expérience, d’un langage ou d’un phénomène saisi dans leur contexte. L’activité personnelle de l’élève lui permet, à travers la situation proposée, de donner sens aux apprentissages. L’erreur constitue une condition essentielle pour apprendre. L’apprentissage consiste en une reconfiguration des représentations de l’élève. L’entrée dans l’apprentissage passe par la confrontation à une situation complexe qui lui donne sens. C’est la confrontation et la résolution de problèmes de plus en plus complexes qui permet à un apprenant de structurer ses apprentissages. La métacognition (ou retour sur expérience) est la condition pour une personne d’intégrer ses connaissances. C’est en effet une compétence à se poser des questions pour se planifier, s’évaluer constamment avant, pendant et après une tâche pour se réajuster au besoin. H.Gardner (1996) avec les « intelligences multiples » légitime les pédagogies différenciées, fondées sur l’activité de l’élève : « Fondamentalement, je considère l’intelligence comme un potentiel biopsychologique. C’est à dire que chaque membre de l’espèce a la potentialité d’exercer l’éventail des facultés intellectuelles propres à l’espèce » (p 55).
Selon ces auteurs, avec certes des variantes, deux tâches principales incombent au maître, ou à l’équipe éducative : proposer à l’élève des tâches authentiques dans des contextes réalistes, pour lui donner la possibilité de développer toutes ses intelligences et de construire son savoir et ses compétences en interaction avec ses pairs. Le maître s’attache aussi à offrir un « environnement déterminant » pour que l’élève se trouve le plus souvent possible en capacité d’agir en créant ses propres situations d’apprentissage. Car l’acte d’apprendre est aussi un acte volontaire qui s’inscrit dans le cadre du projet personnel ou dans celui du pédagogue.
En formation initiale comme en formation continue s’impose peu à peu la nécessité de l’individualisation des parcours comme des apprentissages.
B. L’approche orientante, clé de voûte des apprentissages
C’est l’association « apprendre et s’orienter », qui en mai 2005, à Montpellier, lors du congrès international « L’approche orientante : des changements pour l’école et l’entreprise», initialise en Europe la réflexion sur l’approche orientante en formation initiale, en formation continue et dans les entreprises[8]. Mais qu’est-ce que l’Approche orientante ?
Il s’agit d’une approche systémique qui permet au jeune ou à l’adulte accompagné, de construire son projet de vie (personnel, professionnel et citoyen) à travers des situations authentiques, en même temps qu’il construit ses apprentissages. L’apprenant se voit offrir des situations d’apprentissage permettant d’entreprendre et de mener à terme des projets orientés vers la connaissance de soi et l’inclusion dans la société. Elle se traduit sous forme de compétences c’est-à-dire sous un ensemble de capacités, d’habiletés et de connaissances qui doivent être utilisées efficacement dans un contexte réel (Ferré, 2005). Mobilisant aussi bien les habiletés intellectuelles et pratiques que les compétences émotionnelles, des apprenants comme des éducateurs, l’approche orientante fait de la compétence à s’orienter la clé de voûte des apprentissages. Elle permet d’identifier des éléments significatifs quant à ses démarches d’exploration de soi et de son milieu.
La perspective de l’approche orientante consiste non à « choisir parmi des filières » ou des métiers, mais à se poser la question d’un mode de vie, d’un environnement géographique, et humain : avec qui ai-je envie de vivre, selon quel rythme, est-ce que cela donne sens à ma vie ? En quoi ma vie a-t-elle un sens dans la société où je vis ?
C. L’approche orientante en formation initiale
En formation initiale, l’approche orientante prend la forme d’une démarche concertée entre une équipe éducative et ses partenaires (parents, chambres consulaires, entreprises, syndicats, associations) dans le cadre de laquelle on fixe des objectifs et met en place des services, des outils et des activités pédagogiques visant à accompagner l’élève dans le développement de son identité, dans la construction de ses compétences et de son projet de vie (personnel, professionnel et citoyen). L’école fonctionne alors pour l’élève comme cadre d’analyse de sa situation d’apprenant, de citoyen, de consommateur et de futur producteur. L’idée générale est que tout ce qui se passe à l’école doit concourir à permettre à l’élève de faire des liens entre ce qu’il vit et apprend dans le présent, et son avenir de futur citoyen, personne en relation, producteur et créateur. S’orienter est ce vers quoi tend l’ensemble de l’effort éducatif.
La construction des compétences de l’élève est placée au centre du système scolaire à travers une pédagogie de projet. Il s’agit de construire un environnement facilitant à l’élève la prise de conscience qu’il vit dans une société et qu’il aura un jour à s’y insérer socialement et professionnellement. A cet objectif, susceptible de déclencher la motivation pour les études (principe de mobilisation), chaque discipline contribue en pointant les métiers avec lesquels elle est en lien et les compétences transversales qu’elle développe (principe d’infusion). S’y ajoutent des réflexions sur l’exploration de soi, des stages et des visites en entreprise, de l’information sur les formations, les métiers et les organisations du travail. L’implication des membres de la communauté éducative est organisée. De ce fait, l’ensemble de l’école se met en projet autour de l’élève – auteur et acteur (principe de coopération)[9].
D. Les origines de l’approche orientante
Avec la fin de l’économie planifiée, à partir de 1975, le modèle de l’orientation « diagnostic/ pronostic », reflet de la société industrielle taylorienne, fait progressivement place, sous l’influence de la psychologie humaniste (Rogers, 1968), et des recherches de l’Ecole de Palo Alto (1972) au modèle expérientiel. En filiation avec les travaux de D. Super (1957) sur le développement de carrière, naît en 1974 au Québec un concept opérationnel : l’Activation du Développement Vocationnel et Personnel – ADVP (Pelletier, Noiseux, Bujold, 1974). Ces auteurs montrent qu’on peut rendre les personnes actives par rapport à leur développement professionnel et personnel, en leur proposant à tout niveau des expériences appropriées.
Vingt ans plus tard, d’autres besoins apparaissent : L’approche orientante naît ainsi en réponse à des besoins exprimés par la jeunesse et aux demandes faites par leurs parents[10], de la réflexion de l’ordre des conseillers et conseillères d’orientation et des psycho-éducateurs et psycho-éducatrices du Québec (OCCPPQ) relayée par celle de l’association québécoise d’information sur les enseignements et les professions (AQISEP). Elle prend source dans les travaux cités ci-dessus et dans ceux de l’américain K. Hoyt (1993) qui dit : « L’éducation à la carrière est un effort de collaboration entre le système d’éducation et l’ensemble de la communauté qui a pour but de réformer l’éducation en aidant les personnes, principalement par le biais d’activités scolaires infusées, à relier l’éducation et le travail et acquérir des habiletés générales d’employabilité nécessaires au développement de carrière, ce qui leur permettra de faire du travail – rémunéré ou non rémunéré – une partie significative de leur vie en surmontant les préjugés et les stéréotypes possibles ».
Bien soutenue par le ministère de l’Education, du Loisir et du Sport, l’approche orientante prend appui sur la réforme du système éducatif québécois par les compétences. Pour accomplir la triple mission assignée à l’école : instruire, socialiser, qualifier, le Québec [12] a en effet en l’an 2000, fait basculer la totalité de ses programmes, en commençant par l’école primaire, vers la construction des compétences dans lequel s’inscrit le domaine « orientation et entreprenariat ». Les organisations orientantes mises en œuvre pour atteindre ces buts font l’objet de recherches et d’évaluations en particulier à l’Université de Sherbrooke[13].
E. L’approche orientante en formation continue
En formation continue, l’anticipation de l’évolution des besoins de compétences permet à un partenariat – salarié / entreprise / école – de développer l’autonomie des choix et l’employabilité de chacun et de chacune et de conforter une dynamique favorable à un développement durable et conforme aux principes de l’approche orientante[13].
L’approche orientante est également utilisée comme levier de changement dans le but d’améliorer une situation en modifiant les conditions du processus. Ainsi une expérience de transfert au secteur professionnel social a-t-elle été mise en œuvre à Montpellier (Bousquet – Marxer 2009).
3/ APPRENANCE ET APPROCHE ORIENTANTE : DES BASES COMMUNES
L’approche orientante, comme l’apprenance, valorise des méthodes actives qui permettent aux personnes jeunes et adultes dans des conditions d’apprentissages signifiants, de créer leurs itinéraires individuels.
A. Faire réussir dans le temps présent
« Nous savons maintenant … qu’on ne se prépare pas à plus tard, mais qu’on se doit d’agir ici et maintenant en fonction d’une situation présente bien réelle qui nous sollicite et qui risque de nous révéler à nous-mêmes. Le temps vécu, le temps de l’action s’avère, de fait, de l’orientation en acte, de l’orientation effective » (Pelletier, 2001, 38). L’élève qui réussit à l’école, construit son sentiment d’efficacité personnelle, d’où émerge peu à peu une identité qui si elle est perçue autorise les choix personnels et les transactions avec autrui. Il se trouve ainsi en capacité de se mobiliser pour son avenir (Bandura, 2002). Il en va de même pour les adultes.
B. Développer le sentiment d’efficacité personnelle
L’approche orientante participe de la démarche de développement du sentiment d’efficacité personnelle (Bandura, 2002) à travers des processus d’appropriation reposant sur la construction de projets expérientiels qui articulent l’approche orientante avec l’apprenance, impliquent l’apprenant qui devient acteur autonome, entrepreneur de la construction de connaissances vivantes (Harvey, Lemire, 2001). P. Carré (2006, 137) se réfère ainsi à A. Bandura : « L’auto-efficacité perçue concerne les croyances des gens dans leurs capacités à agir de façon à maîtriser les évènements qui affectent leurs existences. Les croyances d’efficacité forment selon lui le fondement de l’agentivité humaine (human agency) : « Si les gens ne pensent pas qu’ils peuvent produire les résultats qu’ils désirent par leurs actions, ils ont peu de raisons pour agir ou persévérer en face des difficultés ». L’acquisition du sentiment d’auto-efficacité s’inscrit dans une démarche d’apprentissage basée sur des expériences actives qui en développent la maîtrise.
C. Partir de l’expérience pour aller vers un projet orientant
En terme d’accompagnement et de formation continue, il s’agit donc, la plupart du temps, de partir d’une expérience personnelle (cf. SARCA). Celle-ci est porteuse d’une charge émotionnelle et d’un « formatage » intellectuel spécifique. Or il n’est pas sûr que les compétences acquises dans cette expérience vont faciliter un nouveau travail d’apprentissage a fortiori à distance. En effet, sortie de son champ ou de son contexte, une compétence ne peut se transférer que si elle est réutilisée dans un même modèle d’apprentissage (Rey, 1998). S’« il convient alors de développer la capacité des individus à transformer une série de situations et d’incidents vécus en une histoire et un projet personnel» (Touraine, 2005), il s’agit de les placer dans une situation d’élaboration d’un projet orientant qui induit la construction de nouvelles compétences en fonction d’un devenir.
Mettre la personne en situation d’entreprendre
L’entrepreunariat vu comme « le développement de compétences entrepreneuriales chez l’enfant, dont celles de s’entreprendre, d’entreprendre et de créer l’innovation de façon consciente, responsable et autonome» (Levesque, Boudreau, Langlais, 2007), est une modalité particulière de l’approche orientante. Au Québec, dès la maternelle, on trouve des écoles entrepreneuriales.
Constituant une situation authentique, l’entrepreneuriat participe à la construction de l’identité : développement de la créativité, apprentissage du travail en équipe, conduite de projet, fierté de la réalisation d’un objet. La démarche amène les professionnels de la communauté (équipe éducative, entreprises) à coopérer autour des élèves et à créer du lien social. « Les stratégies liées au projet s’installent progressivement, on fait un clin d’œil aux métiers, on y intègre mathématiques, français et éducation à la citoyenneté. Les enseignants donnent sens et consistance à leurs stratégies d’apprentissage» [14].
D. Donner des cadres d’analyse
Les « intelligences multiples » (Gardner, 1996) propres à chaque personne, sont des construits dans lesquels chaque nouvelle information perçue fait l’objet d’un processus assimilation – accommodation, et où les pairs (classes, écoles) et la famille, fonctionnent comme ressources ou contraintes. L’expérience est au cœur de la construction de ce processus. Mais une expérience ne prend sens et n’est formative que dans un cadre d’analyse. Toute notre perception et le traitement de l’expérience sont orientés par un contexte d’utilité ou système d’utilité individuelle. C’est le cadre d’analyse qui structure la perception et permet de poser une problématique sans laquelle il n’y a pas de solution.
Dans le modèle déterministe, le sujet était enfermé dans un profil. Son orientation comme ses apprentissages, lui sont dictés par l’extérieur, il attend qu’on lui fournisse la « bonne solution ». Avec l’apprenance comme avec l’approche orientante, c’est un cadre d’analyse, un environnement facilitant, qui lui sont proposés. On l’accompagne le temps nécessaire pour qu’il pose dans des situations authentiques, les « bonnes questions » qui lui permettront de trouver une ou des solution(s) contingente(s).
E. Vers une information personnalisée
La phase essentielle de toute stratégie d’accompagnement d’une activité autonome inévitablement inscrite dans la durée repose sur le traitement des informations. Or, elle est d’autant plus pertinente qu’elle répond à la conscience d’un besoin. Pour cela il faut, en amont, faire émerger ce besoin chez la personne. C’est la rencontre entre l’objet de l’information et le sujet qui génère, dans un espace symbolique et social, du questionnement. Ce questionnement producteur de sens permet la reconfiguration des représentations dans la mémoire, structurée telle un hypertexte. C’est la phase essentielle de toute stratégie d’accompagnement d’une activité autonome inévitablement inscrite dans la durée. Accompagner le processus d’information pour l’orientation c’est amener la personne à se poser les questions pertinentes mais aussi à développer les compétences nécessaires à son auto-efficacité. C’est créer les conditions d’appropriation d’une stratégie pour lui permettre de reconfigurer efficacement ses représentations. Le processus d’information doit alors se concevoir dans la durée (Quiesse-Ferré-Rufino, 2008).
Dans cette perspective, le logiciel quebecquois « Repères.qc.ca »[15] est un exemple intéressant. C’est un ensemble de ressources d’aide au choix coordonnées et centralisées par le biais de partenariat. C’est un outil virtuel, personnalisé et interactif qui permet une navigation transversale et déclenche une mobilisation, suscite l’intérêt, la curiosité et l’action. C’est aussi un outil d’exploration de l’information qui offre un webfolio[16] autorisant des réajustements permanents, la construction de bilans et de projections (Quiesse 2008). L’expérimentation actuelle du webclasseur Onisep (passeport numérique pour l’orientation) et la mise en place d’une plate forme nationale de réponse aux questions paraissent aller dans le sens du développement d’une information orientante. (Quiesse 2009)[17]
4/ APPRENANCE ET APPROCHE ORIENTANTE DES MODALITES D’ACTION EN FORMATION INITIALE
A. Infusion et coopération
Le principe de l’infusion demande à l’enseignant ou au formateur d’intégrer au contenu de son cours des références à la carrière et au monde du travail (Pelletier, 2004). Il s’agit donc a minima de saisir toutes les occasions données par le cours pour mettre l’apprenant en appétit, en recherche, et en analyse au regard des métiers et des environnements. La discipline ainsi « infusée » passant du statut d’objet de connaissance à celui d’objet d’action, prend un sens nouveau du fait des liens qu’elle manifeste avec les activités professionnelles et sociales.
L’effet sur les apprenants se trouve démultiplié si, porteurs de valeurs partagées, plusieurs enseignants, éventuellement en relation avec un conseiller d’orientation, agissent simultanément, c’est-à-dire coopèrent dans un sens défini en commun. Il se produit alors ce qu’on appelle « un effet établissement ». La démarche prend encore plus de sens pour l’enfant si sont associés à l’action ses parents et les partenaires de l’école (Gingras, in Pelletier, 2004, 48) et (Ferré, avril 2002).
B. Rapprocher les jeunes de leur environnement socio-économique
Depuis 2005, la connaissance active de l’entreprise a fait son entrée officielle dans le système éducatif avec la Découverte professionnelle[18] (option 3h et module 6h), avec cette fois un horaire à l’emploi du temps, un programme fondé sur l’ acquisition de compétences, des modalités d’évaluation, et l’intervention d’équipes pluridisciplinaires, un pas très net est franchi (Crindal, Ouvrier-Bonnaz, 2006). La mise en place des PDMF[19] à la rentrée 2009 crée une nouvelle mesure généralisée, mais sans moyens particuliers.
Au Québec, où le renversement démographique se fait sentir depuis plusieurs années déjà, les pouvoirs publics pour enrayer la désertion des régions et des secteurs porteurs d’emplois empêchant alors le renouvellement de la population active, ont largement engagé ce type de démarche. A titre d’exemple, citons l’outil Cursus, l’école , l’économie et moi (Maurais, 2004) dont les objectifs sont de créer du lien entre les enseignements et leur utilité future dans le monde du travail.
C. Etre accompagné(e) pour prendre en main son parcours
L’apprenant, qui construit ses savoirs et ses compétences, est aussi celui qui prend en main son parcours. Il se trouve en capacité de se porter candidat pour les formations de son choix. « Ce n’est pas une approche qui fait en sorte que l’école décide ou choisisse à la place du jeune. Au contraire, on considère que l’élève est responsable de son cheminement de carrière, et qu’il doit être mieux préparé et aidé à prendre des décisions scolaires et professionnelles qui lui conviennent dans le but de favoriser son insertion future sur le marché du travail et son adaptation dans sa carrière » (Dupont, 2001).
C’est aux professeurs qu’il revient en effet de créer l’environnement pédagoqique orientant, piloter les actions pour qu’elles participent de la construction du parcours de l’élève. Il leur faut aussi accepter que les parents jouent un rôle dans le processus. Pour le professionnel, coopérer, c’est mettre à disposition d’élèves des ressources et un savoir-faire (temps, matériel..), dans le cadre d’un projet (visite, intervention, stage) négocié avec les éducateurs, qui va concourir à l’information de l’élève. C’est offrir des occasions « d’expériences authentiques » introuvables sinon.
Compte tenu de ce qui précède, l’approche orientante est donc de nature à amener les jeunes à se trouver sur des projets cohérents et à établir un nouveau lien social entre l’école et la famille à travers les enfants.
5/ MOBILISER LA PERSONNE A TRAVERS LE PROJET PERSONNEL ORIENTANT
Si, quels que soient l’origine ou le niveau initial, l’accès permanent à l’apprentissage tout au long de la vie tient une place si importante dans cette époque « hypermoderne» (Lipovetsky, 2004) dont l’orientation permanente est le lot alors, il nous apparaît qu’il convient de garantir pour chacune et chacun l’accès facile à ce service, mais surtout l’intégrer dans un projet personnel orientant. En effet, partie prenante d’un processus orientant, la formation prend alors tout son sens pour la personne.
A. Mobiliser la personne sur des projets
Un système vivant se caractérise par son projet. Etre en vie c’est être en projet mais cela ne veut pas dire en projet d’apprendre ou en projet de s’orienter. Mobiliser la personne si elle ne l’est pas, est donc la première mission de l’accompagnateur.
Pour cela, le réflexe consiste souvent à interroger la personne, chercher sa « motivation » : quels sont ses goûts, ses intérêts, « quel métier veut-elle faire ? », « en quoi pense-t’elle être utile à la société ? ». Or justement, elle n’en a pas ou ne sait pas et a sans doute de bonnes raisons pour cela.
Avec l’approche orientante on va chercher à la « mobiliser » ici et maintenant dans le temps présent de la classe et de l’école, du stage ou de l’entreprise, c’est- à -dire à la mettre en situation d’agir et de réussir vraiment des projets personnels et collectifs, à travers lesquels elle va acquérir progressivement une méthode, des compétences et le sentiment d’être efficace dans ce domaine.
B. Créer les conditions de l’approche orientante
Ces approches ont été développées lors de quatre recherches -actions que nous avons menées depuis 1996 dans l’académie de Montpellier.
Ainsi la recherche action du lycée René Gosse (Clermont L’Hérault)[20] est-elle un exemple d’articulation entre projet personnel de l’élève et projets éducatifs emboîtés jusqu’à la tête de l’établissement. Au-delà du champ de l’orientation les effets ont été très positifs en termes d’accès à l’autonomie des élèves, de mobilisation, de transformation de l’ambiance de vie, d’amélioration de la relation entre les adultes et les jeunes, l’établissement et son milieu, mais aussi de résultats scolaires.
La recherche-action du lycée professionnel Méditerranée (2001-2002) portait pour les acteurs, sur l’acquisition d’habiletés à créer du lien et du sens entre les enseignements, les disciplines et les emplois en faisant appel aux capacités de projection des élèves et des équipes et en s’appuyant sur une nouvelle gestion des informations. Son évaluation[21] montre qu’elle a modifié les comportements des élèves au regard des savoirs à acquérir, ceux de la vie dans l’établissement et la conception de l’orientation. « Les stages ont changé les élèves, ils s’impliquent dans la recherche documentaire et des actions telle la journée « porte ouverte ». Et du côté de l’enseignant on déclare « j’appréhende les élèves avec un autre regard, je les vois en tant qu’individu avec un projet personnel et non plus seulement comme élève ». Alors qu’ils étaient considérés comme « orientés », les lycéens de seconde professionnelle ont simplement été autorisés à effectuer un stage de 3 jours dans le secteur d’activité de leur choix, quel que soit le degré de proximité de ce secteur d’activité avec leur formation du moment. Cette expérience a permis à la plupart des élèves de conforter leur situation au lycée dans la voie suivie, à quelques autres d’élaborer des stratégies divergentes précises pour l’ « après-BEP» et enfin à quelques-uns, très rares, de se réorienter immédiatement.
La recherche-action au collège des Garrigues, elle a permis aux professeurs de mathématiques de 3éme, de reconsidérer la notion de transfert. Ils ont ainsi pris conscience qu’une notion acquise dans le cadre de la discipline ne générait pas « naturellement » une compétence utile dans un autre contexte. Le chemin n’étant pas fait par les élèves, ils ont alors imaginé l’accompagnement pédagogique nécessaire pour les mettre en situation d’y parvenir.
Enfin, l’opération « A la découverte des sciences informatiques » a mobilisé 98 élèves et 140 personnes autour d’un projet authentique, visant à connaître et à faire connaître à un public un métier des sciences informatiques, au service de l’art, de la formation, de l’éducation, de l’environnement, de la gestion, du management, des lettres, de la recherche, de la santé, des sciences, du sport, des jeux ou de tout autre domaine de l’activité humaine. Il s’est agi de mettre en oeuvre les principes de l’approche orientante c’est-à-dire : mobiliser les élèves sur des projets concrets, leur donner l’occasion de coopérer entre eux et avec des adultes pour agir et produire, les amener à faire des liens entre les disciplines qu’ils étudient, des métiers et leur orientation[22].
Conclusion
Pour une approche orientante tout au long de la vie
L’apprenance apparaît comme indissociable de l’approche orientante en ce sens que l’interaction entre l’acquisition de savoirs et de compétences sont intimement liées à travers la notion de projet. Elles ‘influent mutuellement l’une et l’autre, tant le développement de l’intelligence humaine, adaptation et transformation, se nourrit de ce processus. En toile de fond du « savoir devenir » se situe l’élaboration d’un nécessaire développement de projets et de démarches personnelles adaptées aux techniques actuelles d’acquisition des savoirs issues de la société de l’information.
Tout petit, l’enfant a des goûts et des intérêts. Tout petit, l’enfant est en interaction avec ses pairs et les adultes. Tout petit l’enfant fait des projets (Étienne, Baldy & Benedetto, 1992). Il est curieux de son milieu et susceptible d’entreprendre et d’agir. Les principes de l’approche orientante dans un contexte d’apprentissage tout au long de la vie et d’orientation continue s’appliquent donc dès l’entrée à l’école maternelle. De nombreux professeurs d’école le savent bien qui sous diverses formes font travailler leurs élèves par projets (environnement, santé, citoyenneté …mais aussi lecture, écriture, sciences, mathématiques, découverte du monde).
Ces démarches ne sauraient s’arrêter à la porte des collèges ou des lycées, encore moins à celle des entreprises. Bien au contraire elles sont la condition même de la réussite.
Montpellier
13 juillet 2009
AUTEURS
FERRE Danielle, présidente de l’association apprendre et s’orienter (www.apprendreetsorienter.org), conseillère d’orientation-psychologue à l’université, chargée de mission académique pour l’éducation à l’orientation, formatrice.
QUIESSE Jean-Marie, Délégué régional adjoint de l’Onisep, psychologue, conseiller d’orientation, formateur et éditeur.
Nous remercions pour sa lecture attentive et ses précieux conseils : Monsieur Richard Etienne, Maître de conférences en sciences de l’éducation à l’Université Paul Valéry de Montpellier.
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Quiesse J.-M. (2006) « Découvrez repères.qc.ca, l’orientation en ligne du Québec ». Montpellier. Onisep Plus. N°84.
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Rey B. (1998) Les compétences transversales. Paris. ESF.
Rifkins J. (2005) L’âge de l’accès. Paris. La Découverte.
Rogers C. (1968) Le développement de la personne. Paris. Dunod.
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Santelmann P. (2005) Qualification ou compétences. En finir avec la notion d’emplois non qualifiés. Rueil- Malmaison. Editions Liaisons.
Sennet R. (2006). La culture du nouveau capitalisme. Paris. Albin Michel.
Super D. (1957). The psychology of careers. New York. Harper and Row.
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Vygotski, L. (1934/1997). Pensée et langage (F. Sève, trad.). Troisième édition. Paris : La Dispute.
NOTES
[1] Bandura A. (2002)
[2] Sept formes d’intelligence : verbale, logico-mathématique, spatiale, musicale, corporelle et kinesthésique, interpersonnelle, intrapersonnelle
[3] http://www.consilium.europa.eu Mieux inclure l’orientation tout au long de la vie dans les stratégies de formation et d’éducation tout au long de la vie.
[4] Tout comme la santé, la culture et la qualité de l’environnement
[5] CSA-JOC, 2006, enquête réalisée auprès de 31206 jeunes de 16 à 30 ans, L’Express du 06/07/06
[6] Deux origines : H. Bouchet, responsable UCI-FO et membre du Conseil économique et social (1998) – H. Trocmé-Fabre (1999)
[7] L’affectif, c’est aimer apprendre, le cognitif : savoir apprendre, le conatif : avoir un engagement pour apprendre (Audition de P. Carré au Comité de l’éducation et de la formation tout au long de la vie. Paris 30 01 06.)
[8] Cet événement, auquel participent 15 personnalités québécoises du monde de l’information et de l’orientation est l’occasion de la sortie d’un ouvrage « Pour une approche orientante de l’école française» qui interroge pour la première fois le système éducatif français et l’orientation au regard des concepts d’infusion, coopération, mobilisation, entrepreunariat. D’autres pays ou régions d’Europe (Province de Taranto en Italie) soit s’intéressent à contextualiser l’approche orientante soit développent des concepts voisins (Galice en Espagne).
[9] Pour des exemples de mise en œuvre, voir la partie 6.
[10] Sommet du Québec et de la jeunesse, 2000.
[11] Le Québec dispose d’une large autonomie à l’intérieur du Canada, en particulier au niveau de l’éducation.
[12] Sous la direction de Mme Marcelle Gingras, Ph.D. secteur orientation professionnelle
[13] Les Services d’accueil, de référence, de conseil et d’accompagnement (SARCA) du Québec optimisent les conditions d’apprentissage par la valorisation du public, la reconnaissance de ses acquis pour le rendre acteur de sa formation. www.cspo.qc.ca/sarca.htm.
[14] Entrepreunariat-études…un concept nouveau, des aventures prometteuses ! – Morin D., conférence prononcée lors du 4éme colloque sur l’approche orientante. Québec, 17 mars 2005.
[15] Repères.qc.ca est développé par la société GRICS.
[16] Cahiers pédagogiques n°463
[17] Symposium de Dijon et séminaire de Montpellier sur l’approche orientante Etienne-Ferré-Leclerc-Quiesse (juin 2009)
[18] Bulletin Officiel n°11 du 17 mars 2005
[19] Parcours de découverte des métiers et des formations , circulaire n°2008-092 du 11 juillet 2008
[20] Cette recherche-action a donné naissance à la méthode d’orientation active Orientation-lycée (2000) L’Harmattan .
[21] Evaluation réalisée par Roland Louis Ph.D de l’Université de Sherbrooke, www.ac-montpellier.fr/orientation (Centre de ressources pour l’éducation à l’orientation)
[22] /www.ac-montpellier.fr/sections/orientation/preparer-orientation/preparer-orientation/orientation-se-construit/ao6-aosci-concours
L’Edutainment : vers une école parallèle ?
C2E 2017
L’Edutainment : vers une école parallèle ?
Semaine de rencontres scientifiques et professionnelles
du 02 au 06 octobre à Poitiers
L’edutainment, contraction de « education » et de « entertainment » suscite de véritables controverses. Pour certains, c’est une révolution pédagogique dont l’efficacité n’a d’égale que l’agrément qu’il procure à ses utilisateurs. Pour d’autres il témoigne de l’abandon de toute exigence éducative et conduit à l’avènement d’une société où ludification rime avec société de consommation. Les enjeux sont importants et concernent tous les acteurs de l’éducation : les professionnels de l’éducation, les collectivités, les services de l’État, les entreprises et bien évidemment le citoyen apprenant, qu’il soit élève, étudiant, parent ou autre.
Le C2E se propose d’éclairer cette problématique par une mise en perspective de travaux de recherche, de pratiques éducatives, de problématiques institutionnelles et de propositions des entrepreneurs de la e-Éducation. Une question servira de fil rouge aux débats tout au long de la semaine : « L’edutainment constitue t-il une sorte d’école parallèle ? ». Cette interrogation fait écho aux travaux de Georges Friedman et à ceux de Louis Porcher qui s’interrogeaient dès les années 60 sur le rôle de la télévision dans les apprentissages et qui mettaient à jour des formes de complémentarité et de concurrence entre l’École et la télévision.
Comme chaque année, la 13ème édition du C2E propose une semaine de rencontres et d’échanges qui associe des chercheurs, des professionnels de l’éducation, des entreprises et des institutionnels.
Avec l’intervention des experts comme Daniel Peraya, Eric Sanchez ou Pierre Tchounikine, l’échange est ouvert à travers notamment une conférence participative et des ateliers animés par des chercheurs et des entrepreneurs du numérique éducatif.
L’Edutainment y sera abordé selon trois dimensions :
- la dimension culturelle et artistique qui lui est associée ;
- la scénarisation et la conception pédagogique à partir de l’association du ludique avec l’éducation ;
- les applications et les projets éducatifs associés au sens ludique des processus d’enseignement et d’apprentissage ;
Le C2E est une manifestation scientifique et professionnelle organisée par l’Université de Poitiers (laboratoire TECHNÉ) et est porté par le Groupement d’Intérêt Scientifique Innover avec le Numérique pour l’Enseignement, la Formation et les Apprentissages (GIS INEFA), structure réunissant les principaux acteurs publics et privés de la filière e-Éducation de Nouvelle-Aquitaine. Consacrer le C2E 2017 à l’edutainment est une façon de contribuer à la dynamique territoriale autour du numérique éducatif. Le faire dans le cadre du GIS INEFA, créé par la Région Poitou-Charentes puis étendu à de nouveaux partenaires dans le cadre territorial de la Nouvelle-Aquitaine, atteste de cette dynamique.
Cette rencontre originale d’une durée d’une semaine s’articule sous différentes formes de communications et d’échanges (conférences, tables rondes, interventions artistiques et culturelles, concours d’innovation, expérimentations, démonstrations de produits et services innovants) en croisant les approches scientifiques et professionnelles. Cette manifestation, ouverte à tous à niveau national et international, associe 200 à 300 professionnels du champ de l’éducation issus d’entreprises, d’établissements publics et de collectivités territoriales ainsi que des chercheurs et des étudiants français et étrangers.
Source Toht Cursus
Programme et inscription (gratuite mais obligatoire) : http://www.c2e-poitiers.com/
Étudier est-il un acte contraint ?
Curieux phénomène que «l’étudiant libre», comme si étudier était normalement un acte contraint. D’un certain point de vue, l’ignorant ne peut demander ce qu’il ne sait pas, on ne peut que lui suggérer l’intérêt que l’étude d’un sujet peut représenter pour lui.
Dans les systèmes scolaires étatiques, on suppose que l’intérêt des études de base a bien été démontré et fait l’objet d’un accord tacite, alors on saute cette étape. Jusqu’à 16 ans, l’étudiant n’est pas libre.
Ensuite un accord implicite prend le relais : il faut des connaissances pour pouvoir travailler, payer son loyer, obtenir un statut social, etc. La pression sociale et économique contraint l’étudiant à une discipline qu’il n’aurait peut-être pas choisi spontanément.
Mais un système éducatif n’a pas nécessairement à être contraignant, à preuve pendant presque 50 ans l’enseignement mutuel a très bien fonctionné en Europe au 19 ième siècle, mais l’État ne pouvait se priver d’un aussi bon moyen de contrôle de sa population; il a fait le choix de l’enseignement simultané : un prof et une classe, tous au même rythme. Le système éducatif que nous maintenons est contraignant par choix politique; nous n’avons rien à dire au niveau de ses orientations ni de ses programmes alors que nous le pourrions et que cela correspondrait beaucoup mieux à l’apprentissage individualisé que l’on espère atteindre à coup d’algorithmes et de données massives. De toutes façons, les étudiants ne font que rarement ce qui était prévu.
Dans certains contextes, l’étudiant peut être affranchi des pressions extérieures et diriger son attention là où il le désire, comme un chercheur. Jusqu’ici, il fallait être économiquement et socialement indépendant ou être capable de supporter la marginalité dans son milieu; être marginal ou fréquenter une école marginale. Mais internet a changé la donne : on peut maintenant choisir ce qui nous intéresse et étudier comme on l’entend sans que personne ne trouve rien à y redire. On peut partager ses connaissances et collaborer à enrichir l’ensemble tant dans son contenu que dans son organisation.
Plus besoin d’être riche ou à sa retraite pour pouvoir étudier ce qui nous intéresse. Les institutions éducatives choisiront t-elles la liberté pour leurs étudiants ? Certaines commencent à considérer la possibilité, surtout que le mur démographique approche…
Denys Lamontagne – info@cursus.edu
Éditeur de Thot Cursus
Commencements-recommencements
Commencements & recommencements
Journée d’échanges et de réflexions au CNAM (Paris)
à l’occasion de la parution du n° 210 d’Education permanente
La question des commencements – ou des recommencements – fait partie de ces problématiques que l’on rencontre un peu partout dans le champ de l’éducation et de la formation des adultes. On « commence » un cours ou un programme de formation, on « recommence » à apprendre ou à travailler, on cherche aussi à comprendre les « commencements » ou les origines d’une situation, d’un développement ou d’un phénomène inexpliqué… Quiconque pénètre les coulisses de la formation perçoit qu’il y a là un enjeu central, pour le formateur comme pour l’apprenant. Derrière la thématique des commencements se cache en effet la difficile question de ce que l’on nomme couramment les ressorts, déclencheurs, leviers et autres « moteurs » de l’activité. Or rien n’est plus difficile que de commencer, et de penser ce commencement. En s’emparant de ce thème banal en apparence, Education permanente invite à une réflexion transdisciplinaire sur la question de l’initiation et des initiateurs de l’activité, dans le champ de la formation et dans toutes sortes de contextes.
Programme et bulletin d’inscription : cliquer ici
Orientation-Lycée
Danielle Ferré (éd) Gilles Gustau – Régine-Eva Pénisson Kleinhans – Philippe Roquigny L’Harmattan, 2000
Orientation-Lycée est une méthode pour vous aider à guider les élèves de la seconde à la terminale, dans la construction progressive de leurs choix.