Rapport de la Cour des comptes
La Cour des comptes vient de publier un rapport « l’éducation nationale face à l’objectif de réussite de tous les élèves ». Celui-ci pose le problème de la relation entre les investissements globaux et la réussite des élèves. Beaucoup d’éléments y sont examinés même si on pointe l’absence d’évaluation sur beaucoup d’indicateurs, notamment sur ceux qui ont trait aux mesures d’aides à la réussite.
Télécharger le rapport complet de la cours des comptes
Trop de recours au redoublement pour un taux de bacheliers trop faible
Le rapport met en lumière la place de la France, en tête des pays développés en termes de redoublement. Celui-ci coûte, chaque année, 2 milliards d’euros. Chacun sait pourtant que cette mesure n’est pas un outil pédagogique mais qu’elle renforce l’inégalité sociale. Chiffres à l’appui, il relève que, pour une génération, la proportion globale de bacheliers aujourd’hui est inférieure à celle de 1995, malgré une forte progression du domaine professionnel. Cette situation paraît en contradiction avec l’objectif de 50% d’une classe d’âge dans l’enseignement supérieur, en manque chaque année de 110000 étudiants.
Une faible implication des enseignants dans la préparation de l’orientation
Par ailleurs, malgré 650 millions d’euros attribués chaque année au titre de l’ISOE (indemnité attribuée à chaque enseignant de collège et de lycée pour l’orientation), les entretiens menés révèlent que seuls 10% des enseignants estiment que l’aide à l’orientation fait partie de leur mission. Le découpage “taylorien” des tâches entre professeur, CPE, COP et documentaliste est une spécificité française dont la performance serait à examiner. La mission de l’enseignant peut-elle se réduire à la seule transmission disciplinaire des savoirs? Les enquêteurs constatent que la plupart des élèves sont orientés sans stratégie de réussite, à travers un système rigide de filières sans passerelles. L’éducation à l’orientation tout comme les DP (découvertes professionnelles) restent surtout considérées comme une préorientation vers l’enseignement professionnel.
Des décisions d’orientation très scolaires pour un système discriminant
Les décisions des conseils de classe paraissent trop souvent fondées sur les résultats scolaires, en interactivité avec des idées floues sur l’attendu en termes des filières d’accueil mais aussi dans le cadre d’une offre de formation disparate. Ainsi, l’hétérogénéité des destinées scolaires est mise en lumière, avec des chances de réussites qui varient sur le territoire selon une fourchette de 20%. L’orientation semble alors se résumer à faire entrer les élèves dans une offre scolaire segmentée où 50% se trouvent privilégiés par une distillation ségrégative. Et les moyens engagés pour aider vraiment les élèves en difficulté (ou plutôt ceux qui mettent en difficulté l’institution) sont jugés insuffisants. Mals intégrés au cursus général et trop tardifs ils sont vécus comme une voie de relégation et non pas comme un accompagnement positif.
Des conclusions qui interrogent l’organisation de système éducatif
Le rapport conclut que l’enseignement scolaire français, où le retard à 15 ans est le plus important, fait partie de ceux qui arrivent le moins bien à traiter efficacement la difficulté scolaire. Son modèle d’enseignement ne permet pas d’atteindre les objectifs fixés par la nation et génère de l’insatisfaction. Son organisation est davantage conçue pour privilégier les élèves sans difficultés particulières qu’organisée en fonction de tous ses élèves. Les réformes engagées ont pour défaut de ne pas affronter ce qui tient à l’inadaptation de la structure du système scolaire. Celle-ci ignore largement les missions éducatives autres que celles de la transmission de connaissances disciplinaires. Lorsque celles-ci existent, elles ne reposent que sur l’implication personnelle des enseignants et des agents. Compte tenu de ces constats, la Cour n’appelle pas à une augmentation uniforme des moyens. Il lui semble incohérent de continuer à consacrer environ deux fois moins de moyens à l’éducation prioritaire qu’à une pratique de redoublement. Elle ne peut accepter qu’une l’école primaire reçoive moins de financements publics que les lycées alors que c’est à son niveau qu’il convient de lutter contre les carences scolaires. Ainsi elle demande que le système scolaire ne continue pas à allouer des moyens de façon indifférenciée mais qu’elle les concentre là où ils sont le plus utiles. Et pour cela il est nécessaire de mesurer et d’évaluer. Enfin, il convient de supprimer tout ce qui entraine une différenciation anormalement marquée ou précoce des parcours des élèves mais aussi de répondre à l’intégration dans le service des enseignants des missions d’accompagnement personnalisé et de travail en équipe.